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l'auteur

Mélanie Gribinski est née à Paris en 1969.

Elle reçoit, en 1989, le premier prix, décerné à l'unanimité, de l'école de photographie MJM à Paris.

Élève du photographe Reza, elle travaille ensuite au laboratoire professionnel de photographie Imaginoir. Trois ans plus tard elle se spécialise dans le portrait N&B à la chambre.

Elle réalise un projet de 50 portraits de psychanalystes, parmi les plus grands noms de la psychanalyse française.

En 1995 elle s'installe à Marseille et commence une série de portraits de poètes, invités du centre international de poésie dans les murs de la Vieille Charité à Marseille, puis fonde les éditions La Chambre en 1997 (jusqu'en 2002) et publie notamment un recueil de photographies et de planches contactes inédites de la photographe Denise Colomb sous le titre Instantanés.

En 2005, Elle part vivre à côté de Bordeaux et intègre, en octobre 2006, Imagiques, association pour la promotion de la photographie en Aquitaine.

Les portraits d'artistes et d'intellectuels, et les portraits de famille, sont ses centres d'intérêts photographiques.

contact@melaniegribinski.com
www.melaniegribinski.com
 

 

 

Mélanie Gribinski


Philippe Fénelon, Paris, 15 septembre 1999 © Mélanie Gribinski

 

Vous photographiez des gens connus. En général les artistes considèrent que glorifier un petit sujet permet mieux de montrer le savoir-faire artistique que de prendre en photo quelqu'un qui a une notoriété. Les photographes people font par ailleurs des gens connus un usage parfaitement lucratif. Comment situez-vous votre métier de portraitiste ? Comment choisissez-vous les modèles ?

Je ne photographie pas des gens connus pour faire de l'argent. Je photographie quelqu'un parce que j'ai envie de le rencontrer. Le portrait est un prétexte à passer un moment privilégié avec un être humain que j'apprécie, plus ou moins connu ; intellectuels, artistes, défenseurs des droits de l'homme, poètes, chercheurs...

C'est une façon de m'entourer de tous ceux dont les actions, la création, la pensée ou l'engagement contribuent à l'idée que je me fais du monde idéal. Dans un monde gouverné par la répression, ma petite participation à la lutte pour la liberté se trouve dans le choix des personnes que je photographie. Jamais je ne photographierai quelqu'un dont les opinions sont à l'opposées de mes convictions.

Je regretterai toujours de ne pas avoir fait le portrait de John Cassavetes, Luis Buñuel, ou Albert Einstein.


Didier Anzieu, Paris, 24 mars 1994 © Mélanie Gribinski

 

Comment êtes-vous venue à la photographie ?

Je ne sais pas exactement à partir de quel moment c'est arrivé ; une première expérience photographique lors d'un atelier photo à l'école primaire, puis à16 ans mon père me donne son appareil photo, un Pentax, et son agrandisseur, un Krokus. J'installe un labo dans une petite pièce au dernier étage de l'immeuble. Peu après mon beau-père me donne son Nikon F2, j'apprends ensuite que mon arrière-grand-père était photographe amateur, je récupère son matériel (un stéréoscopique et une chambre 6X9) et ainsi de suite jusqu'à ce que je m'inscrive dans une école photo privée sans grand intérêt. Heureusement, et c'est peut-être là que ça commence vraiment, Reza est intervenant dans l'école pendant toute une année. J'en sors avec le premier prix décerné à l'unanimité et Reza me propose d'être son assistante pendant une semaine au festival d'Arles. Six mois plus tard je suis embauchée au laboratoire Imaginoire que je quitte au bout de trois ans après avoir rencontré des photographes aussi différents que Sebastiaò Salgado, Sarah Moon, Gisèle Freund ou Grégory Colbert. J'achète alors une chambre 18X24 et je commence une série de portraits de psychanalystes...

 

Vos personnages sourient rarement, pourquoi ? Leur demandez-vous une attitude particulière ?

Ils ne sourient pas parce que je leur demande de ne pas bouger pendant plusieurs secondes (entre 1 et 4 selon la luminosité de la pièce). Ce n'est pas facile de garder un sourire figé plusieurs secondes sans se sentir bête...


Franck Venaille, Paris 16 septembre 1999 © Mélanie Gribinski
 

 

Les personnages sont souvent installés au milieu d'un espace. Quand ils ne sont pas au milieu (photographie de Franck Venaille), il semble que la lumière prenne la première place. Votre photographie se joue-t-elle au centre de l'image ?

C'est la personne que je photographie qui m'intéresse, elle est donc bien souvent au centre, c'est vrai. Mais la façon que chacun a d'éclairer son "chez soi" donne des indications sur comment le lieu est habité. Franck Venaille habite un beau duplex très lumineux au dernier étage d'un immeuble dans Paris. Cette photo est la dernière prise de vue sur les 6 plans films habituels. Je me rappelle avoir tourné autour du sujet, changé de cadrage à chaque plan film. C'était beaucoup de tension pour lui, atteint d'une sclérose en plaques, et pour moi qui n'arrivait pas à trouver un point de vue satisfaisant. Finalement je me suis décidée à affronter ce canapé blanc devant ce grand mur blanc éclairé par une double porte fenêtre. Je me suis dit que Franck Venaille serait plus tranquille à attendre que je fasse mes réglages assis bien calé dans un coin du canapé. Après avoir parcouru une image du regard, l'œil a besoin de se poser. Je ne sais pas si ma photographie se joue au centre de l'image. Sans doute. Peut-être. Pas toujours.

 

Qui choisit le lieu de la prise de vue ?

Lorsque je rentre chez quelqu'un pour le photographier, nous prenons quelques instants pour faire connaissance. C'est souvent cet échange de paroles qui influence le lieu de la prise de vue, en accord avec mes impressions et bien sûr, avec les possibilités qu'offre la lumière. C'est une alchimie entre ce que je vois et ce que me raconte cette personne à propos de son lieu de vie qui détermine mon choix.

 

Avec quel appareil et objectifs photographiez-vous ?

Je travaille avec une chambre 18x24 Lorillon en bois d'après guerre montée d'un Boyer 210 en laiton ou parfois d'un Tessar 300 sans obturateur. Ça va faire 14 ans... Et ma Lorillon va maintenant aller se reposer, parce que je viens d'acheter une Shen-Hao 20X25... Youpiiii!!!

 

Qui s'occupe des développements et des tirages ?

J'ai toujours développé moi-même (excepté au tout début, je donnais mes plans films à développer au labo Contrejour rue Daguerre, où travaillait Guillaume Géneste et je faisais faire mes tirages par Isabelle Menu). Lorsque j'ai pu installer mon labo chez moi, je me suis occupée de faire les tirages par contact, jusqu'à ce que je rencontre Pascal Bonneau à Marseille. Depuis trois ans je lui confiais les agrandissements 50x60, mais il m'a annoncé récemment qu'il ne ferait plus que des tirages par contact au platine. Je songe donc à m'y remettre...

 

Qu'est-ce pour vous qu'une photographie réussie ?

Question difficile. Une seule réponse reviendrait à faire une généralisation alors qu'il y a tant de photographies différentes réussies pour des raisons différentes. Est-ce qu'une photographie réussie techniquement est une photographie réussie? Beaucoup de critères interviennent. Je crois que le sujet photographié, la lumière, l'angle de vue, le contexte historique, politique, les choix techniques etc... font qu'une photographie peut provoquer une émotion, donner une information importante, faire passer une idée, raconter une histoire, témoigner. En ce qui concerne mes photos, un de mes portraits les plus réussis est une photographie ratée. J'ai exposé deux fois le même plan film tout à fait involontairement et la superposition est bien tombée ; Patrick Sainton est un artiste qui travaille sur la mort et le double... C'est peut-être ça une photographie réussie, c'est une photographie qui fait sens, qui permet d'associer.

 

 

Patrick Sainton, Marseille 2005 © Mélanie Gribinski

 

     
   

dernière modification de cet article : 2006

 

 

 

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