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l'auteur

Michel Brissaud



Né en 1964 en Moselle
Vit dans le Limousin et travaille à Paris
Formé à la photographie
dans les années 80
dans un Photo-Ciné Club SNCF
 Pratique le moyen format carré
et la chambre 4x5 et 8x10
http://www.michelbrissaud.com
 

 

 

Sur le travail de Michel Brissaud
visionnez un film de Jean Demaison

l'auteur du film

Jean Desmaison



né en 1948 en Limousin
Passionné de photographie
et de musique
depuis l'âge de 8 ans

Auteur-réalisateur vidéo
10 place Manigne
87000 LIMOGES

05 55 34 80 21
06 70 96 73 20
www.jeandesmaison.com
clip(at)jeandesmaison.com
 

 

 

 

 

 

Michel Brissaud : Warriors

 

 

Qui sont ces personnages ?

Ces personnages sont des joueurs d’Airsoft.

Revêtus de protections et de répliques d’armes à air comprimé qui projettent de petites billes en plastiques, ils simulent des combats selon un certain nombre de règles et de codes. Ces personnages ne sont pas des joueurs de « Paintball » qui, eux, utilisent des projectiles chargés de peinture éclatant lors de l’impact.

Organisés en associations ou en « team » – il peut y en avoir plusieurs dans la même ville – ils sont en France 20 à 30 000 à pratiquer cette discipline tous les week-ends. Ils ont en général pour terrain de jeu des lieux désaffectés, des carrières et autres friches industrielles. Des rencontres internationales existent et peuvent réunir jusqu’à 3000 joueurs.

 

 

Pourquoi les photographiez-vous ?

Cette série de portraits est un peu le fruit du hasard. Je mène depuis deux ans un projet d’exploration d’une friche industrielle près de Limoges. Le hasard a voulu qu’un dimanche matin de mars 2009, explorant « ma friche », je me suis retrouvé nez-à-nez avec une patrouille militaire, équipée de la tête aux pieds, treillis de camouflage, casque en kevlar, radios et Famas ou M16 à l’épaule. Je me suis cru perdu au beau milieu d’un exercice militaire en imaginant le pire. Ce n’est que quelques minutes plus tard, en arrivant à leur point de rassemblement, que j’ai découvert l’existence de ces « warriors ». Aussitôt, j’ai pensé que je tenais là un vrai sujet pour aguerrir ma pratique du portrait.

 

 

Quelles sont exactement les règles du jeu ?

Le jeu consiste en un affrontement d’équipes lors d’un « game » ou « set » selon un scénario préétabli ; le principe étant qu’une personne atteinte d’une bille de plastique par un adversaire est sorti du jeu. Sous des apparences quelque peu primaires – je te tue et j’évite de me faire tuer – les us et coutumes de ces « warriors » du dimanche se révèlent pleines de variantes et de subtilités. Il existe plusieurs scénarii de jeux avec des variantes calquées sur l’univers du jeu vidéo. Pour ne citer que les plus connus, ils empruntent à Doom, Unreal Tournment, Quake, et autre Counter Strike leurs « mods » pour définir les scénarii de jeux.

Un petit inventaire rapide des réjouissances :

- Le « Death Match » ou le combat à mort. La règle est dans ce cas on ne peut plus simple. Le dernier joueur « en vie » est déclaré vainqueur. Il peut y avoir des variantes avec des limitations de temps de jeu si les joueurs sont nombreux. Dans ce cas, l’équipe déclarée gagnante est celle qui compte le plus de membres en vie.

- Le «Flag » ou l’attaque/ défense du drapeau. Ce scénario se déroule en temps limité de 15 à 20 min. Une équipe commence le « game » avec un drapeau qu’elle doit défendre, l’autre (ou les autres équipes) devant s’emparer du drapeau. L’équipe gagnante est celle qui détient le drapeau à la fin de la partie.

- Le « Marines contre Aliens ». Se joue en temps limité ou non. 90% des personnes présentes sont dans l’équipe des « Marines », 10% dans celle des « Aliens ». Un « Marine » touché n’est pas exclu du jeu, il est transformé en « Alien » et change d’équipe ; un Alien touché n’est pas non plus exclu du jeu, il est immobilisé et doit attendre d'être secouru

- L’extraction « VIP ». Un joueur prend le rôle d’une personnalité capturée par une équipe, à charge pour l’autre de la délivrer.

Il y a des codes, des usages et des langages :

Ces parties, quels que soient les scénarii retenus, se déroulent sans arbitre, en auto-régulation complète. La contestation d’une touche est rarissime. Par ailleurs, les zones de jeu sont souvent délimitées lorsque les espaces sont très vastes. A nouveau, cette règle est en général respectée. Un promeneur du dimanche peut se retrouver sur une zone en plein « game » ; le jeu s’interrompt instantanément pour assurer la sécurité du promeneur et la partie reprend après son passage. D’une manière générale, les « airsofters » sont extrêmement sensibles à leur image et ne commettent pas d’imprudences.

 

 

Quelle est la motivation dans cette activité ?

Si l’on s’intéresse aux motivations et aux plaisirs des « warriors », il faut préalablement s’intéresser à la clé d’entrée dans la sphère de l’Airsoft. La plupart de ces joueurs sont des pratiquants de jeux en réseau sur internet. Pour eux, la pratique de l’Airsoft n’est que le prolongement de ce qu’ils pratiquent virtuellement sur leurs claviers. La recherche d’adrénaline, la confrontation physique, la transposition du virtuel au réel sont souvent évoquées. L’aspect matériel est une autre dimension. Tenues, répliques et autres accessoires sont collectionnés et certains peuvent porter sur eux pour plus de 3000 euros d’équipements.

 

 

Que font ces joueurs dans le "civil" ?

Contrairement à l’idée générale que l’on peut en avoir – où du moins celle que j’en avais avant de les rencontrer- nous ne sommes pas en présence de « recalés » des institutions militaires et/ou policières. Toutes les professions et les catégories sociales sont représentées. Sous les tenues de camouflages et autres casques en kevlar, se « cachent » des étudiants, des employés de grands magasins, un chef de rang dans un grand restaurant de Limoges, un gérant de cybercafé, un cadre bancaire ; les âges varient de 18 à 45 ans. Seule une minorité de femmes est adepte de ces jeux.

 

 

N'avez-vous pas le sentiment que vos photographies puissent encourager leur jeu guerrier ou une sorte d'esthétique de guerre ?

D’emblée, je ne me suis pas posé la question dans la mesure où ce travail est né d’une contrainte que je me suis imposée – développer une pratique de portrait – et d’une opportunité, à savoir la rencontre fortuite de ces personnages sur mon site d’investigation de friche.

Avec un peu de recul, je ne me la pose toujours pas. Ma démarche s’inscrit plus dans une tradition documentaire, que dans une dimension esthétique. Mes choix techniques et le protocole retenu vont dans ce sens. Je pense que si la question de l’esthétique de la guerre avait été le sujet, j’aurai abordé le sujet « embedded » dans les jeux avec un Nikon D3X et un 70-200 mm ultra performant.

 

 

Quelle est votre position par rapport à leur jeu ?

Une certaine neutralité. Je ne suis pas un adepte de l’Airsoft. Je ne juge ni ne condamne. J’ai maintenu cette empathie tout au long des séances. Cette posture et la répétition des séances étalées sur deux ans m’ont permis de trouver rapidement la bonne « distance » dans la relation : suffisamment proche pour placer les sujets à 1,50 mètre de la chambre, assez distant pour imposer le protocole que je m’étais fixé.

 

 

Pourquoi une approche à la chambre 20x25 ?

J’ai choisi la chambre en format 20x25 à en raison du rapport particulier qu’instaure ce type d’équipement entre le sujet et le photographe. Après quelques centaines de portraits, j’ai la conviction que la chambre agit comme un catalyseur dans la situation photographique ; sans être l’élément essentiel, elle est perçue comme un matériel imposant qui dénote une forme de solennité et de respect pour le sujet. Du coup, la direction des « modèles » s'en trouvent facilitée. Lorsque l’on explique que le coût d’un plan film est de l’ordre de 5 euros, les modèles deviennent sérieux et complices pour la réalisation d’une belle photographie. Le taux d’images ratées a été très faible et quand cela s’est produit, c’était plus du fait de mes mauvaises manipulations que du fait de l'indiscipline des modèles. Enfin, l’originalité du procédé puis la remise d’un beau tirage de 30 cm x 37,45 cm – chaque modèles à eu son tirage et son équivalent en fichier en Jpeg – ont largement contribué au recrutement de proches en proches des modèles.

A la fin de l'été 2009, l’information sur l’existence du « photographe à la chambre en bois » a bien circulé et les modèles sont venus de loin pour se faire « tirer le portrait ».

 

 

Quel matériel utilisez-vous ?

J’utilise une chambre Deardorff 20x25. C’est avant tout un bel objet en bois vernis. Malgré quelques petits défauts, elle a l'énorme avantage de déclencher chez les sujets un grand capital de sympathie. Toutes les séries réalisées et en cours l'ont été avec une optique unique de 360 mm. Le pied est un vieux Linhof en aluminium léger et extrêmement rigide sur lequel j’ai monté une tête Arca Swiss Z1 très facile d’emploi. J’ai commencé la série avec des plans-films TXP320 et j’ai continué en 2010 avec des plans-films HP5. Les plans films sont développés en cuvette, 7 min dans du HC110 1+39, les scans étant réalisés avec un Scitex Eversmat à 1200.

 

Pourquoi le noir et blanc ?

Le noir et blanc est ma pratique historique. Au démarrage de cette série de portraits, je n’avais jamais pratiqué la couleur en 20x25. Je conçois que la couleur aurait pu également donner de bons résultats mais différents, probablement quelque chose qui aurait renvoyé à une perception accrue de modernité.

Enfin, pendant tous ces week-ends de prises de vues, je ne cessait d’avoir  à l’esprit les derniers portraits de Richard Avedon, réalisés en 2004 à Fort Hood, base militaire américaine où étaient cantonnés 45 000 soldats en partance ou de retour d’Irak. Ces portraits avaient été réalisés en noir et blanc, avec une chambre Deardorff…

 

dernière modification de cet article : 2011

 

 

 

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