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l'interviewé

Jean-Claude Bertin est dessinateur dans une entreprise de mécanique Franc-Comtoise.
Après une longue pratique des modèles réduits d'avion, il est devenu constructeur amateur et pilote de moto-planeurs U.L.M. La photographie et les sports de montagne occupent aussi ses loisirs depuis toujours. 

 

 

 

 

 

 

Construire soi-même un appareil 6x9 léger à partir d'éléments Mamiya-Press

interview de Jean-Claude BERTIN
(
propos recueillis par Emmanuel Bigler)

Résumé : Jean-Claude BERTIN nous explique comment associer un objectif de chambre Mamiya-Press (ou toute autre optique de chambre légère équipée d'un obturateur central) à un châssis rollfilm Mamiya-Press par l'intermédiaire d'un boîtier très léger en fibre de verre. Il réalise ainsi un appareil 6x9 allégé à viseur, sans télémètre, utilisable pour la photo à main levée, à emporter partout avec soi.

L'idée de construire soi-même un appareil à rollfilm

Cette idée de fabriquer toi-même un appareil à rollfilm 6x9, est-elle ancienne ?

On peut dire que cela remonte aux années 1970. J'ai eu la chance de pouvoir faire de la photo aux côtés d'un ami photographe professionnel ; je connais donc très bien les appareils moyen format à rollfilm, le Rolleiflex SL66 en particulier pour l'avoir souvent utilisé. J'ai aussi -tu vois qui je veux dire- un bon copain qui ne demande qu'à me prêter son Rollei bi-objectif de temps en temps ... J'ai donc l'impression depuis cette époque de ne jamais avoir arrêté de faire des photos sur rollfilm en moyen format.

Mais dans les années 70 sont arrivés, en ce qui me concerne, deux appareils 24x36 légers et compacts donnant des images de très haute qualité : le Rollei 35 et l'Olympus OM1. Comme tu le sais je les ai toujours, je ne compte plus le nombre de fois où je les ai emportés dans mon sac à dos, au ski, et puis plus récemment en vol avec mon aile ULM [1] : ils fonctionnent toujours parfaitement.

J'avais donc un peu laissé de côté les appareils de moyen format. Mais j'ai toujours eu l'idée qu'une optique de chambre avec son obturateur incorporé c'est finalement quelque chose de très compact si on ne se préoccupe pas de miroir réflex ou de télémètre. D'une certaine façon, toute la technologie inaccessible à l'amateur est concentrée dans l'optique montée sur son obturateur central, alors que pour l'appareil lui-même une petite chambre monorail en bois [2], [3], ou même un appareil panoramique à rollfilm [4], on peut fabriquer cela soi-même avec un peu de soin. Certains amateurs très férus d'ébénisterie et nostalgiques du laiton utilisé pour les réglages des appareils anciens fabriquent eux-mêmes des chambres en bois d'un style très raffiné [5]. Mais on peut aussi repartir d'une ancienne chambre technique et la remettre à niveau à sa façon [6]. Par rapport à la complexité à laquelle sont arrivés les appareils 24x36, où il semblerait que rien ne puisse jamais être contruit facilement par l'amateur, les appareils à rollfilm ou les chambres grand format permettent d'avoir ce plaisir de fabriquer ou de personnaliser soi-même son appareil.

Alléger un appareil existant

Mais finalement, qu'est-ce qui t'a décidé à « sauter le pas » et à vouloir fabriquer toi-même sinon un appareil 6x9 complet, du moins à ré-assembler des éléments à ton idée ?

C'est d'avoir trouvé un ensemble Mamiya-Press (Universal) 6x9-6x7 d'occasion. Je crois que je pensais, en fait, toujours à cette idée d'un appareil à rollfilm le plus petit possible donnant toute la qualité d'images du moyen format. Le format carré ne m'a jamais vraiment convaincu, je ne le « sens » pas bien pour faire du paysage, mais ce n'est pas la question.


le Mamiya Press de départ

Dans le « kit » Mamiya-Press que j'ai trouvé, il y avait de nombreux accessoires dont un adaptateur de verre dépoli et pas mal de bagues allonge qui m'ont donné des idées pour faire des pièces de liaison, avec un contrôle possible sur le dépoli, j'en reparlerai. En manipulant tout le système j'ai pensé que je pourrais alléger considérablement l'appareil en supprimant le télémètre et en re-fabriquant un boîtier léger en fibre de verre. Comme tu vois il ne s'agit pas de reconstruire complètement un appareil, mais d'adapter des éléments existants. Je pense que cette approche progressive est à recommander à ceux qui veulent fabriquer eux-mêmes un appareil à rollfilm ou une chambre avec mouvements. Le fait que j'ai pu mener à bien ce projet m'incite évidemment à aller plus loin.

Un petit rappel sur le Mamiya-Press / Mamiya-Universal ?

C'est un appareil à rollfilm très modulaire, non réflex. Un représentant de l'espèce aujourd'hui disparue des « chambres de presse » à télémètre et mise au point par bague tournante, dont Linhof avait plusieurs exemplaires à son catalogue jusqu'à la fin des années 1960 [7]. Les optiques du Mamiya Press ont chacune leur obturateur central incorporé et une rampe hélicoïdale de mise au point couplée au télémètre par un système de came, un peu comme... ahem... un 24x36 à télémètre très célèbre, sauf qu'ici l'obturateur est un Copal dans chaque optique et non pas à rideaux dans le plan focal. Les dos-châssis 6x7-6x9 sont interchangeables avec un volet comme n'importe quel châssis rollfilm de chambre, sauf que la pièce d'appui n'a rien de standard, par exemple ce n'est pas interchangeable [8] avec un dos Mamiya RB 6x7 ou un Horseman 6x9. On peut mettre un verre dépoli pour contrôler la mise au point en macro-photo lorsque le télémètre sort de ses limites de couplage. Le Mamiya Press devient alors une petite chambre à rollfilm : le modèle que j'ai n'a pas de mouvements, mais certains avaient une bascule limitée du dos par un système de coulisses sur quatre tiges comme sur l'ancienne Linhof-Color des années 60.

Le fait de pouvoir régler la distance objectif-film en contrôlant la netteté sur le dépoli m'a incité à ne conserver finalement que le bloc optique et le châssis rollfilm. Et finalement en renonçant au télémètre l'idée est de re-fabriquer un boîtier le plus léger possible pour faire la liaison entre l'objectif et le film. Le châssis ayant son propre levier d'armement et de rembobinage, l'obturateur étant à armement manuel séparé, aucun couplage n'est donc plus nécessaire. Maintenir une bonne perpendicularité et une bonne distance objectif-film, avec la possibilité de vérifier sur le dépoli au montage, voilà le principe finalement assez simple de cette adaptation.

Pourquoi vouloir alléger ?

Alléger, c'est une démarche de tous les instants en construction de modèle réduits d'avions, et bien plus en construction U.L.M, mais aussi pour la montagne quand on fait son sac à dos, toutes activités qui m'ont toujours passionné. Transportant le Mamiya-Press dans mon sac à dos, je me suis rendu compte que je me servais finalement assez peu du télémètre pour les photos de paysage par beau temps, les graduations de profondeur de champ sur la bague de mise au point étant alors suffisantes, comme avec un Rollei 35. La profondeur de champ n'est pas la même bien entendu avec un 100mm en 6x9 qu'avec un 40 en 24x36 ; mais de fait je n'ai jamais trouvé en pratique que c'était une limitation pour l'utilisation d'un 100mm (ou une plus courte focale) avec le Mamiya. Je n'utilise pas le Mamiya en macro-photo, mais là encore, sur le terrain et sur pied en travaillant comme avec une chambre on se passerait du télémètre grâce à l'adaptateur de dépoli arrière. Il m'a donc semblé possible d'alléger l'appareil et de le rendre plus compact moyennant de renoncer au télémètre.

Les résultats que j'ai obtenus en termes d'économie de poids sont intéressants : mon boîtier en résine et fibre de verre ne pèse que 230 g, contre 1,2 kg pour le boîtier du Mamiya Press. Dans une configuration courante avec l'optique Mamiya standard de 100mm et un dos-magasin rollfilm 6x9 mon boîtier allégé (viseur externe compris) ne pèse que 1,520 kg contre 2,370 kg pour l'appareil d'origine ; et en ajoutant la poignée ergonomique qui est presque indispensable pour tenir ce lourd boîtier à main levée, on arrive à plus de 2,5 kg ! soit un gain de poids de plus de 35% sur la configuration 'tout métal' du Mamiya (voir en annexe le devis détaillé des poids).

La liaison objectif-film et le calage optique sur l'infini

Comment as-tu abordé et résolu le problème de la liaison objectif-film ?

Mon « kit » Mamiya Press d'occasion appartenait sans doute à un professionnel qui faisait pas mal de macro-photo. Il y avait donc un grand nombre de bagues allonge. Le système des bagues allonge du Mamiya Press est intermédiaire entre un système à baïonnette, comme les bagues de n'importe quel système réflex 24x36, et le vieux système des tubes filetés « T2 » [9]. Le jeu de bagues Mamiya Press se compose d'une première pièce qui s'adapte sur le boîtier, et qui réalise une liaison (baïonnette - filetage), puis des tubes filetés qu'on peut empiler à volont�� puisqu'il n'y a aucune transmission électrique ou mécanique entre le boîtier et l'objectif. On perd évidemment en macro le couplage du t��lémètre. Enfin une dernière bague de type (filetage - baïonnette) permet de monter le bloc optique à l'extrémité des tubes. Au risque de choquer les amoureux de la macro-photo avec un Mamiya Press...

... Monsieur Bergereau [10]: ne lisez pas ce qui suit !!!

... je me suis rendu compte que ce système de bagues macro m'offrait directement les deux montures à baïonnette dont j'avais besoin pour adapter les optiques Mamiya Press sur mon futur boîtier allégé, ainsi que de pouvoir adapter un grand nombre d'optiques de chambre sur le Mamiya Press, ou sur mon boîtier.


le boîtier en fibre de verre

Ce boîtier est monobloc en fibre de verre et résine époxy, la technique étant celle que tu connais pour la fabrication des fuselages de planeur en modèle réduit [11]. Sur la face arrière du boîtier j'ai préparé une pièce d'appui en dural sur laquelle viendra s'adapter le châssis rollfilm ou le verre dépoli. On trouvera en annexe une vue 3-D de cette pièce et un plan coté permettant de la fabriquer avec précision. Bien entendu cette pièce est propre aux châssis rollfilm du Mamiya Press, pour un autre type de dos-magasin comme un Horseman ou un Mamiya RB il faudra concevoir une autre pièce. L'intérêt avec le Mamiya Press c'est de disposer du verre dépoli interchangeable dont la position par rapport au plan d'appui sur l'arrière du boîtier (ou sur ma pièce de liaison) est parfaitement identique à la position du film lors de la prise de vue.

Pour mettre en position le tube porte-objectif, j'ai alésé le boîtier en fibre de verre au plus juste, placé le tube allonge équipé d'une optique Mamiya (en l'occurrence le « standard » 100mm/f3,5) réglé sur l'infini, puis visé un objet à l'infini. Évidemment tu vas dire que j'aurais dû utiliser un collimateur pour être précis, mais l'immeuble d'en face me coûte moins cher comme objet-test à l'infini... En enfonçant plus ou moins le tube j'ai réalisé une image la plus nette possible. En ce qui concerne la perpendicularité de l'axe optique du tube par rapport au plan d'appui, je me suis fié au réglage de la machine qui m'a servi à faire l'alésage avec le plan de la pièce de sortie comme plan d'appui. J'ai vérifié sur le dépoli qu'il y avait bien netteté uniforme sans bascule indésirable pour des objets lointains. À partir de cette position, le tube a été immobilisé par des vis puis collé à l'époxy pour qu'il ne bouge plus.

Quelles sont les précautions à prendre pour ne pas se tromper, car cela a l'air assez délicat tout de même ?

Évidemment il ne faut pas se tromper grossièrement dans l'empilement des cotes, mais le fait de partir d'un boîtier existant sur lequel on peut tout mesurer facilite la tâche : en 6x9 les pièces sont bien plus grosses qu'en 24x36, c'est plus facile aussi sous cet angle. Pour le réglage de la distance entre le plan d'appui de la baïonnette d'objectif et et le plan d'appui du châssis, on peut coulisser le tube sur plusieurs millimètres ce qui est très suffisant pour rattraper une petite erreur de cotes. C'est peut-être dans l'appréciation de la mise au point à l'infini que réside la difficulté. On voit bien que plus le format sera grand, plus cette vérification sera facile à la loupe, mais pour l'instant j'en suis resté au 6x9 de mon châssis Mamiya. Pour ce qui concerne la perpendicularité, je ne vois pour l'instant guère d'autre solution en partant d'un tube allonge que de préparer à la machine un alésage bien perpendiculaire au plan d'appui avec juste assez de jeu pour permettre de coulisser le tube en vue de sa mise en place finale.

Adaptation d'un objectif de chambre, le problème de la rampe de mise au point

Tu m'as dit que tu pouvais également monter un autre objectif de chambre sur le Mamiya Press ou sur ton boîtier allégé : peux-tu en dire un peu plus ?

Ce qu'il y a de bien avec un bi-objectif ou un appareil à viseur non réflex dont l'optique a un obturateur central incorporé, c'est que tu n'as plus à te soucier de la présélection du diaphragme. En acceptant d'avoir à réarmer l'obturateur à la main, et en abandonnant le couplage du télémètre [12], toute optique de chambre ou presque peut être adaptée sous réserve d'encombrement et de tirage mécanique. Plus le format est petit, plus ce sera délicat, mais beaucoup d'optiques de chambre couvrant le plan film 4"x5" sont très peu encombrantes et seront adaptables sur un boîtier à rollfilm 6x9. Ce que j'ai cherché c'est un grand angle couvrant le 6x9, de focale comprise entre 65 et 90mm, 100mm étant la diagonale du format 6x9. J'avais déjà un 65 Mamiya Press, j'étais donc parti pour essayer de trouver un 75 ou un 90. Compte tenu de ce qu'on trouve facilement en occasion, mon choix s'est finalement porté sur un Super Angulon Schneider 90 f/8. Bien que cela puisse paraître un peu curieux comme comparaison pour une optique capable de couvrir un angle proche de 100 degrés (cercle d'image un peu supérieur à 200mm), utilisé en 6x9 avec une diagonale d'image de 100mm cela nous donne l'équivalent d'un 38 mm en 24x36, une focale très proche de celle du Rollei 35. Sans être aussi compact que les anciens Angulons, cet objectif 90 f/8 a un encombrement tout à fait compatible avec le Mamiya Press. Le problème à résoudre était celui de la rampe hélicoïdale de mise au point.

Cela s'achète, mais avec tes compétences en mécanique, ne pouvais-tu pas fabriquer une telle rampe toi-même ?

Je crois que tu ne réalises pas bien la difficulté de fabriquer une telle pièce à l'unité avec une machine courante. Tout d'abord, il y a un problème de tenue de toutes les bagues photographiques qui sont assez minces : qu'elle soit en dural ou en laiton, on ne tient pas une bague à usiner simplement dans un mandrin classique à trois mors car il y a un risque important de déformer la pièce, ou pire un danger réel si on ne serre pas assez (de peur de déformer) qu'elle échappe lorsqu'on engage l'outil. Il faut concevoir et fabriquer des pièces spéciales pour tenir la bague : cela peut prendre plus de temps que l'usinage de la bague elle-même. Mais la principale difficulté avec les rampes hélicoïdales de mise au point c'est qu'elles ont un très grand pas à filets multiples. Il n'est pas question de reprendre à la main la pièce avec un tour classique pour fabriquer ces filets multiples en plusieurs passes ! Non, il y a sans doute des machines ou des procédés de production particuliers pour cela, et finalement le prix auquel une bague hélicoïdale pour optique de chambre est vendue séparément, bien qu'élevé, reste raisonnable par rapport à n'importe quel accessoire de chambre professionnelle. On oublie un peu vite que pour arriver à ce qu'une optique photographique d'amateur complète, disons un 50mm f/2 pour 24x36 en monture métal, coûte si peu cher, c'est qu'on les fabrique par centaines de milliers !

Finalement la solution que j'ai choisie s'est présentée d'elle-même par les conséquences d'un méchant « caprice » de mon « vieux » gros zoom 24x36 dont la commande de présélection de diaphragme ne fonctionnait plus. C'était un de ces zooms 35-105 de première génération, il m'a servi fidèlement pendant plus de quinze ans. Entre temps, les progrès des zooms 24x36 ont été tels que pour le prix de la réparation j'aurais certainement trouvé un zoom (en occasion sans doute) plus moderne et beaucoup plus performant en compacité et en qualité d'image. Je me suis donc dit que je ne risquais rien à tenter un démontage, au mieux je ferais moi-même la réparation, au pire je comprendrais l'agencement mécanique interne... et je pourrais toujours récupérer la rampe de mise au point. Cette rampe hélicoïdale « sert » maintenant mon Super Angulon : pas si déshonorant comme « retraite active » pour une pièce qui sinon serait restée au placard dans un zoom devenu inutilisable... Tu admettras aussi que les images que j'obtiens avec ce Super Angulon, même sur un « petit » format 6x9 ne me feront jamais regretter celles de mon zoom 24x36 des années 80...

Mais franchement, ce problème de rampe de mise au point, n'est-ce pas un peu décourageant pour quelqu'un qui souhaiterait suivre ton exemple ?

Il faut finalement accepter de partir de quelque chose qui existe. Le projet n'a d'intérêt que si l'appareil qu'on fabrique soi-même est servi par une très bonne optique : d'accord c'est plus facile avec du film 400 ASA de faire un appareil rollfilm à sténopé ! Mais pour n'obtenir à la fin que la qualité d'un jetable 24x36, cela ne m'intéresse pas. Le surcoût d'une monture hélicoïdale n'est donc peut-être pas si insurmontable pour quelqu'un qui déciderait de ne pas faire de concession sur le budget « optique » et qui choisirait d'entrée un petit objectif moderne standard de 100mm f/5,6 pour chambre 6x9 monté sur sa rampe de mise au point. L'intérêt de la rampe de mise au point hélicoïdale, c'est sa compacité, pour moi c'est très important. Bien sûr on peut penser re-fabriquer un système de mise au point rustique, une petite 6x9 monorail dans l'esprit du « Kit Bender » [3], mais on perd la simplicité et la compacité de mon « Mamiya allégé ». Maintenant tu peux aussi dire qu'il vaut mieux racheter une ancienne chambre de presse complète, c'est une autre option : je ne pense pas que quelqu'un trouvant en bon état et pas trop cher une Linhof de presse des années 60 avec un Planar 2,8 de 100 aurait à se plaindre...

Mais finalement, pour du paysage, pourquoi ne pas simplement bloquer l'optique, disons sur la distance hyperfocale de f/8 et supprimer le réglage de mise au point ?

Pour pouvoir faire cela il faut sans doute avoir un très grand angle, en 6x9 un 65 à la limite, ou mieux un 55. Mais l'idée de ne pas pouvoir faire ne serait-ce qu'une retouche de mise au point ne me plaît guère.

Viseur et fixation du châssis rollfilm

On voit sur la photo qu'il y a un viseur optique sur cet appareil allégé...

C'est simplement le viseur Mamiya indépendant livré avec le grand angle de 65. Il en existe un pour le 75 Mamiya Press. Je l'ai monté sur une griffe standard. Je peux ajouter un petit cadre pour réduire l'angle de vue avec le 90. On peut de fait imaginer d'associer n'importe quel viseur du plus rustique, à cadre sans optique, jusqu'au plus perfectionné... par exemple la merveille Linhof Multi-focale. La sortie récente d'un petit appareil télémétrique japonais (déguisé dans certaines régions du globe sous l'habit d'un « classique allemand ») fournit, en neuf, tout le choix de viseurs qu'on veut... mais c'est un peu cher. Il y a aussi en viseurs « universels » ce que la Russie et l'Ukraine offraient à la haute époque de la « copie » des appareils télémétriques allemands. Il suffit de faire une petite règle de trois pour trouver les « focales équivalentes » c'est à dire trouver les viseurs de même angle de vue que telle ou telle optique utilisée avec une image finale de 56x82mm.

Peux-tu dire un mot sur la fixation du châssis rollfilm ?

Je suis allé à l'essentiel et je n'ai pas cherché à refaire un système de blocage à barres coulissantes dans le genre « graflock ». Comme je ne démonte pas le châssis si souvent et qu'on peut facilement en trouver d'occasion, donc à terme en avoir plusieurs, j'ai simplement 4 vis qui appuient sur des plaquettes de maintien de façon à presser assez uniformément le châssis contre la pièce de raccordement. C'est le fraisage bien ajusté de la pièce qui assure l'étanchéité à la lumière, cela marche bien. La pièce est en dural anodisé noir (voir en annexe).

Les châssis 6x7 6x9 du Mamiya Press sont un peu curieux. Ce n'est pas un type « dos d'âne », car les bobines sont situées de part et d'autre de la fenêtre d'image ; dans ce châssis le film est finalement moins « torturé » que dans un dos-magasin où les bobines sont par derrière en étant, dit-on, un source potentielle de déformations persistantes du film 120 (forcé à contre-courbure par les rouleaux) si on ne s'en sert pas très souvent (cas des amateurs). On a ce châssis Mamiya bien en en main, je n'ai pas eu à ajouter de poignées ou de bossages pour tenir l'appareil allégé correctement.

Je suis néanmoins tenté par les petits dos-magasins « dos d'âne » 6x9 comme les anciens Graflex-Graphic, ou celui du RB 67, ce qui permettrait de faire, dans le même esprit un autre appareil encore plus compact.

Une conclusion toute provisoire...

Une dernière question : puisque tu as réussi à associer un Super Angulon f/8 de 90 avec ton châssis 6x9, ne serais-tu pas tenté de tirer partir de tout le cercle d'image nette de cette optique (qui à quelques millimètres près dans les coins couvre presque le format 13x18cm) sur un format de film nettement plus grand ?

Oui, pour ne rien te cacher, je suis en train de réfléchir à fabriquer un autre châssis pour rollfilm 120 moi-même avec une longueur d'image supérieure aux 82-85 mm classiques du 6x9. Je t'en reparlerai le moment venu : cela ne se fabrique pas en un jour !

Annexe 1 : devis de poids du Mamiya Press d'origine et du boîtier all��gé

appareil d'origine

 

boîtier en fibre de verre

 

Mamiya Press nu

1200 g

boîtier allégé nu

230 g

objectif de 100mm

500 g

idem

500 g

dos-magasin 6x9

670 g

idem

670 g

   

viseur externe

130 g

poignée ergonomique

200 g

   

total

2,570 kg

 

1,53 kg

sans la poignée :

2,370 kg

 

 

Pour mémoire : le 65 mm du Mamiya Press sur sa rampe hélicoïdale pèse 350 g ; le Schneider Super Angulon 90mm f/8 sur rampe 'maison' pèse 500 g, c'est à dire pas plus que le 100 mm d'origine ; et n'oublions pas qu'un un Mamiya 645 avec le 80mm standard complet pèse 1,4 kg, et un Rolleiflex 3,5F (6x6) 1,22 kg.

Annexe 2 : pièce de raccord pour châssis rollfilm Mamiya Press

La figure suivante vous donne une idée de la pièce permettant de raccorder un châssis rollfilm Mamiya Press à un boîtier de votre fabrication

 


Un plan coté est disponible à télécharger ici pour vous permettre de fabriquer (ou de faire fabriquer) cette pièce vous-mêmes.

Vous trouverez un grand nombre d'informations techniques sur la gamme d'appareils Mamiya Press - Universal sur le site du constructeur qui fournit aimablement cette information pour des appareils depuis longtemps retirés de la production [13].

Propos recueillis par Emmanuel Bigler :  Mail

 

 

Notes & références

1  

U.L.M : classe d'aéronefs Ultra-Légers-Motorisés prévus pour des conditions atmosphériques stables par vent faible, dont les caractéristiques de vol sont : une vitesse de croisière réduite, une faible charge alaire et un prix de revient (carburant) très économique. Les formalités pour piloter un U.L.M sont simplifiées par rapport à l'avion léger classique des aéro-clubs.

2

Jon Grepstad, ``Building a Large Format Camera. Plans and Instructions for Building a 4 x 5 Monorail Camera''. 2e édition, ISBN 82-993938-1-7 http://home.online.no/%7Egjon/jgcam.htm

3

Bender Photographic, Inc., 19691 Beaver Valley Road, Leavenworth, WA 98826, USA http://www.benderphoto.com

4

Jason Selinger ``Hand-crafted 6cm x 17cm Camera'' http://www.cirkut.com/cameras/wood.html

5

Fabio Quadarella, ``Due fotocamere field 4"x 5"'' http://users.iol.it/qua.fabio/

6

Jon Grepstad, ``Refurbishing and Modifying a Crown Graphic Camera''. http://home.online.no/%7Egjon/crown99.htm

7

"Linhof Camera Story'', histoire illustrée et caractéristiques techniques des chambres Linhof, livre (allemand-anglais) publié par Linhof http://www.linhof.de. Pour avoir plus de renseignements sur ce livre : mailto:books@linhof.de

8

Mamiya a fabriqué pour Polaroïd une chambre de presse très voisine du Mamiya Press, qui apparaît sous la marque « Polaroïd » dans pas mal de foires à la photo encore maintenant. Hélas, bien que ressemblant comme deux gouttes d'eau au Mamiya Press, ce modèle n'a rien de compatible avec son cousin Mamiya : la baïonnette d'objectif et la liaison boîtier-film sont différentes.

9

 

Tubes ou bagues allonge « T2 » : système de bagues filetées au pas de M42 x 0,75. Ce type de monture, à ne pas confondre avec le « 42 à vis » (M42 x 1) est bien connu de ceux qui veulent adapter un boîtier réflex 24x36 sur un télescope ou un microscope. Chaque tube a un filetage mâle et un filetage femelle M42 x 0,75 ; les tubes se vissent les uns sur les autres. Par exemple en combinant des tubes de longueur de 5, 10, 20 et 40 mm ils permettent avec 4 tubes seulement de réaliser toutes les longueurs entre 5 et 75mm par pas de 5mm. Une première bague raccorde le boîtier à un filetage intérieur T2 femelle. Cette bague d'adaptation existe pour presque toutes les montures à baïonnette 24x36 plus le 42 à vis (M42 x 1) et quelques montures moyen format. Ce système assez peu onéreux permet, outre la macro sans l'achat d'un soufflet, toutes sortes d'adaptations à condition bien entendu d'accepter de perdre les couplages mécaniques ou électriques entre le boîtier et l'optique. Les bagues T2 sont de fait inutilisables avec toutes les optiques « modernes » 24x36 auto-focus à commande électrique, mais permettent via une bague de couplage T2-M39 d'utiliser une optique d'agrandisseur à condition que le boîtier soit muni d'un obturateur à rideaux dans le plan focal.

10

Voir cet article de Louis-Michel Bergereau :
www.galerie-photo.com/pratique_du_mamiya.html

11

La technique de moulage est celle utilisée par les amateurs en modélisme pour fabriquer toutes sortes de pièces légères : carrosseries de mini-voitures, capots-moteurs d'avions, fuselages, carénages de roues, etc... On part d'un forme en bois exactement aux dimensions finales de l'objet. Cette forme doit être recouverte d'un mastic spécial puis finement poncée et polie car de son état de surface initial va dépendre l'aspect final de la pièce moulée. Sur cette forme on fabrique un moule en creux en résine et fibre de verre. Pour ce moule les contraintes de poids importent peu, on peut le renforcer avec des pièces en bois pourvu qu'il soit solide et que son état de surface intérieur soit parfait. Là encore il y a un revêtement de première couche appelé « gel-coat » qui conditionne l'état de surface polie du moule. Après démoulage de la forme en bois, le moule en creux sert à fabriquer la pièce finale sous forme d'une coque mince en résine et fibre de verre. Pour cette pièce le choix de la résine et des tissus (qui outre les tissus de verre traditionnels peuvent être de la fibre de carbone ou d'autres fibres synthétiques), le soin mis lors de l'imprégnation et l'étuvage final conditionnent outre la qualité de surface, la légèreté et la résistance de la pièce terminée.

12

Il est en principe possible sur un appareil à télémètre couplé de remplacer l'optique d'origine par une autre exactement de même focale, sous réserve bien entendu que son cercle d'image nette ait un diamètre suffisant pour le format choisi. Sachant qu'un 100mm nominal pourra avoir une focale de 98 ou de 103mm, on voit qu'un ajustement serait a priori à prévoir.

13

Documentation technique Mamiya http://www.mamiya.com/customerservice1.asp?id=3&id2=115

 
Emmanuel Bigler 2002-06-24

 

dernière modification de cet article : 2002

 

 

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