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l'auteur
Carlos Barrantes

Tireur et photographe
né en 1960
Créateur d'un atelier artisanal
de photographie en 1993
tirages argentiques
procédés alternatifs (platinotypes, charbon, papier salé et albumine,
cyanotype, gomme bichromatée, Vandyke et Polaroid transfert)
tirages numériques.
Maître de stages pour de multiples
institutions :
École Nationale Supérieure Louis Lumière, Paris, France
Institut National du Patrimoine, Paris, France
Universidad Navarra, Pampelune, Espagne
Fundació Miró, Majorque, Espagne
Centre d’Art Bozart, Abidjan, Côte d’Ivoire
Son œuvre photographique, séries
“Mouvement”, “Surprise”, "Territoire Chillida", “Par-delà l’horizon”,
“Je suis", "Un jour partons"- a été exposée en plusieurs pays d’Europe
25, rue des Jeunes Années
66100 Perpignan
FRANCIA
Tel.: +33 (0)4 30 44 32 81
Móvil: +33 (0)7 78 81 07 01
info@carlosbarrantes.com
www.carlosbarrantes.com
www.carlosbarrantes.com/art.html
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Interview par
Version originale en espagnol
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Etre tireur en 2011,
une interview de Carlos Barrantes
par François Besson
Carlos, pourriez vous
nous présenter votre démarche photographique ?
Je suis venu tardivement à la
photographie, à l’âge de 27 ans. J'ai débuté comme assistant de
photographes de mode (Javier Vallhonrat entre autres). Un jour que
j'apportai du matériel à un grand laboratoire artisanal en Espagne,
je vis pour la première fois un cyanotype. Ce fut le début d'une
passion; je décidai alors que le laboratoire serait mon activité
professionnelle, la photographie mon travail personnel. Je réussi à
rentrer dans ce laboratoire en 1988 et durant plus d'un an je
débutai en développant les négatifs et en faisant des tirages
contacts. Plus tard, je devins tireur. Mes recherches sur les
procédés alternatifs ont commencé à cette époque.

Quatre ans plus tard, en 1992, j'ai
ouvert mon propre laboratoire à Palma de Majorque, réalisant des
tirages argentiques et alternatifs (et tout spécialement des
platines et des charbons) tout en poursuivant mon œuvre
photographique personnelle.
En 2006, je déménage à nouveau,
m'installant près de Perpignan et je rajoute à mes activités
antérieures une chaîne numérique permettant des tirages jet d'encre
Fine Art en Digigraphie (atelier labellisé par Epson) et l'obtention
de contretypes de grands formats (60x80 cm ou plus).
A côté de cette activité de
laboratoire, j'ai poursuivi mon œuvre photographique, vendant des
tirages platine à la Bibliothèque Nationale de France et des
transferts d'émulsion Polaroid et Fuji au musée Carnavalet. A ceci,
s'ajoutent encore mes activités d'enseignement.
Vous êtes tireur en
procédé alternatif, pourquoi ce choix ?
Je suis avant tout un tireur, les
procédés alternatifs ne sont qu'une façon d'exprimer une image, mais
j'ai également réalisé de gros travaux en argentique – comme les
tirages de l'exposition de 2009 de Graciela Iturbide (327
tirages ! ) et je continue à en faire.
Les procédés alternatifs sont avant
tout ma passion car ils poussent à l'extrême l'alliance du
savoir-faire et des choix artistiques.

Cela ne doit pas être
facile d’installer un dialogue avec les clients photographes qui
vous confient le tirage de leurs images alors que vous êtes
vous-mêmes photographe ?
Cela ne me pose pas de problèmes !
J'offre au photographe un savoir-faire de tireur que je mets au
service de son projet artistique – cette problématique d'interface
entre les moyens et le projet m'est familière car je la rencontre
également dans mon travail personnel. Je n'applique donc pas une
recette "maison" quel que soit le photographe, recette qui ferait
que mes tirages seraient identifiables quel que soit l'auteur des
photographies.
Par ailleurs, quand je réalise
des tirages pour des clients, j'y mets la même passion que pour mes
propres images: je les aime et les défends avec la même véhémence !
Quel est votre procédé
de tirage préféré ?
Cette question n'a pas vraiment de
sens pour moi car je les aime tous autant les uns que les autres –
ce qui ne signifie pas qu'ils soient tous équivalents. La demande
est naturellement plus forte pour le platine et le charbon que pour
la gomme, le cyanotype, le papier salé ou l'albumine mais en tant
que tireur j'ai un faible pour la gomme qui offre une latitude
d'interprétation nettement plus importante que les autres procédés.

Certaines images sont
plus particulièrement faites pour certains procédés : par exemple
une image où il y a une grande richesse des tons sombres profitera
du platine. D’autres images pourront être desservies par le même
procédé. Vous connaissez cela en tant que photographe. Mais que
faites vous en tant que tireur si votre client ne veut que du
platine pour une série donnée ?
Bien sûr le client décide en dernier
recours, mais il m'arrive fréquemment de suggérer une technique
différente et de le convaincre au vu des résultats que je peux
obtenir à partir de son image (je n'hésite pas à faire des essais
dans une autre technique pour lui montrer les résultats). Pour en
revenir à votre question, il faut faire table rase des a priori. Une
image très épurée mais riche en hautes valeurs peut donner un
magnifique tirage platine. Il n'y a pas vraiment de « canons » ou
plus exactement, il faut savoir s'en écarter si la démarche a un
sens.
Vous étiez installé en
Espagne. Vous avez franchi la frontière et vous voilà installé à
côté de Perpignan. Pourquoi ce déménagement ?
Quand mon atelier était installé aux
Baléares, j'enseignais à Madrid comme à Paris et mes clients
venaient du monde entier ; depuis cinq ans je réside en France et
rien n'a changé !
Quelle est la démarche
pour vous donner des tirages à faire ? Y a-t-il des conseils à
donner au client qui voudrait vous donner ses photographies à mettre
sur le papier ?
L'idéal pour moi est de rencontrer la
personne, de voir ses images et de m'entretenir avec elle de son
projet – cela évite bien des déconvenues de part et d'autre ; en
effet une même image peut donner lieu à des interprétations très
différentes et mes critères ne sont pas forcément ceux du client. Un
dialogue permet de mieux cerner ses attentes d'une part et pour moi
de faire des propositions susceptibles d'enrichir le projet initial.
Ceci est l'idéal, mais certains
photographes me font confiance : ainsi je n'ai rencontré Graciela
Iturbide que le jour du vernissage de son exposition – ce qui fût
source d’une grande inquiétude, puis d’une énorme satisfaction ! Le
plus souvent même les gens me contactent par mail ou par téléphone
et m'envoient leurs négatifs par courrier. Nous discutons ensuite
des images afin de définir ensemble les meilleurs choix esthétique.
Vous exercez également
des activités de formation en collaborant régulièrement avec des
écoles de photographie ou des institutions culturelles.
C'est une activité à laquelle
j'accorde beaucoup de valeur. Elle oblige à confronter en permanence
ses connaissances à celles des étudiants, à les synthétiser et à
expliciter toutes les erreurs et tous les doutes que l'on peut
rencontrer. Certaines institutions m'invitent pour des ateliers
ponctuels (Universidad Navarra, Pampelune, Espagne ; Fundació Miró,
Majorque, Espagne ; Centre d’Art Bozart, Abidjan, Côte d’Ivoire,
entre autres). Certaines écoles ont intégré les procédés alternatifs
dans le cursus de leurs étudiants (École Nationale Supérieure Louis
Lumière, Paris; Institut National du Patrimoine, “Les procédés
pigmentaires : Charbon et Gomme bichromaté”, Paris ; entre autres)
et font appel à mes compétences pour cet enseignement. Ainsi, à
l'école Louis Lumière, j'anime depuis 2003, en collaboration étroite
avec Jean-Paul Gandolfo un atelier sur le platine et le palladium
qui se renouvelle chaque année dès les beaux jours et qui me tient
particulièrement à cœur. En 2005, j'ai entrepris également un projet
de recherche “Une nouvelle vie pour la photographie. Procédés
historiques de tirage. Tirage de copie et facsimile” en
collaboration et avec le financement du Fondo Fotográfico
Universidad de Navarra, d’une durée initiale de trois ans.
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