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l'auteur

Henri Peyre
Né en 1959
photographe
Beaux-Arts de Paris en peinture
webmaster de galerie-photo
ancien professeur de photographie
à l'Ecole des Beaux-Arts
de Nîmes

www.photographie-peinture.com
organise des stages photo
www.stage-photo.info


 

 

 

 

 

 

Analyse d'image
Degas : Jeunes Spartiates

par Henri Peyre

 

La cible

Nous entreprenons ici l'étude d'une peinture de jeunesse de Degas :

https://www.nationalgallery.org.uk/paintings/hilaire-germain-edgar-degas-young-spartans-exercising

Le titre de cette œuvre de Degas est peu établi. On peut trouver l'œuvre sous le nom de l'éducation des spartiates, ou de Petites filles spartiates provoquant des garçons. Edgar Degas était très attaché à cette œuvre complexe, réalisée vers 1860, dont il ne se sépara jamais.

Nous reproduisons ci-dessous un reflet de cette œuvre (pour ne pas enfreindre les droits d'auteur).

degas-jeunes-spartiates

Le tableau est intéressant par l’impression que l’image est particulièrement stylée et contrainte. Sa richesse tient beaucoup à la gestuelle des différents personnages. Le décryptage des postures révèle du sens, explique les impressions du spectateur et, conduit à son terme, permet de mieux apprécier le tableau.

Composition et sens

etude de tableau de degas

Trois groupes de personnages sont représentés, assez nettement détachés les uns des autres :
- le groupe des filles,
- le groupe des garçons,
- le groupe des adultes.

Le premier coup d'œil, avec la perception de ces groupes, fait penser au spectateur que le sujet du tableau risque d'être celui des rapports entre ces différents groupes.

analyse d'une image de Degas

A l'heure des études de genre, la question vient tout de suite à l'esprit : qui domine ?

Les têtes des garçons sont placées au-dessus de celles des filles (si l'on élimine de l'analyse le premier des garçons) et au-dessus de celles des adultes. La première impression pourrait donc être que les garçons sont dominants. Toutefois, un regard sur les pieds révèle un étagement perspectif, conduisant à reconnaître une imbrication des plans des groupes de filles et de garçons. Cette deuxième interprétation ne laisse pas le garçon du premier plan en-dehors de l'analyse, et est donc plus intéressante :

plans de l'image

 

2 plans sur les garçons encadrent le plan où sont regroupées les filles, tandis qu'adultes et fond de paysage jouent les figurants dans le lointain.

L'action apparaît ainsi comme imbriquée dans le sens de la profondeur du tableau, alors qu'elle n'est pas imbriquée dans le sens horizontal, chaque groupe étant nettement isolé dans l'espace.

L'impression est donc que garçons et filles qui sont nettement séparé sur la surface du tableau ont à voir malgré tout dans la même scène.

Un très grand nombre d'éléments jouant sur des horizontales travaille à réunir les acteurs de la pièce :
- Le ciel est indifférencié dans sa lumière, de gauche à droite (alors que l'éclairage, si l'on considère les ombres, vient du haut gauche du tableau).
- Les lignes du paysage d'arrière-plan portent de solides bases horizontales.
- Les regards qu'échangent les personnages sont largement horizontaux.
-L'élément le plus fort de l'horizontalité est le bras de la jeune fille, porté droit vers le groupe de garçons.

analyse peinture de degas

L'extrémité du bras de la jeune fille arrive au point le plus fort de la composition : traditionnellement le croisement des deux diagonales, centre du tableau, du regard du peintre et du spectateur. Une conclusion s'impose : les filles mènent l'action. Les garçons ne dominent pas. On les provoque.

Et pourtant, en réalité, qui provoque ?

nudité des garçons

La nudité des garçons est complète, les vêtements enlevés sont dans l'herbe ; tandis que les filles sont à demi-nues, poitrine à l'air. Les adultes de l'arrière-plan sont eux tout à fait habillés.

Les garçons provoquent à la sexualité des filles qui ne semblent pas indifférentes.

provocation sexuelle

La provocation sexuelle, objet du tableau, est renforcée par ce personnage du premier plan. Il est surnuméraire. Il y a 4 filles d'un côté et 4 garçons plus lui de l'autre. Par ailleurs, il présente une posture bien étrange : à quatre pattes comme un animal.

Dans ce petit jeu dont on voit parfaitement où il va mener, qui provoque, qui désire, qui tempère ? La position des mains des uns et des autres est éloquente :

 

La fille du centre de l'image porte une main complètement engagée à l'horizontale vers le groupe des garçons, mais sa deuxième main tournée vers le bas l'ancre malgré tout au même endroit où elle est encore . Le jeune garçon en bas à droite de l'image montre une attirance bien plus grande pour le groupe des filles : ses deux mains sont complètement tournées vers elles. Rien ne peut plus le retenir. Une deuxième fille, dont on ne voit qu'une main tournée elle aussi complètement vers les garçons, est retenue à grand peine par la fille du fond, dont la main visible retient l'élan de la précédente. La dernière fille à gauche n'est pas disposée à bouger : ses mains pointent également plutôt vers le bas et de façon symétrique par rapport à la verticale. Deux autres garçons présentent une main seule tournée vers les filles. Ils sont plutôt décidés à y aller. Un troisième ne montre ni ses mains ni ses intentions. Le dernier garçon lève deux mains symétriques et neutres par rapport aux filles, mais c'est pour mieux exhiber son sexe offert aux jeunes femmes.

Conclusion

On peut discuter du titre de cette œuvre à la lueur des quelques éléments fondamentaux repérés. Il ne nous semble pas qu'un titre comme Petites filles spartiates provoquant des garçons ne soit très juste. Les garçons ne sont pas nus par hasard. Ce sont eux les provocateurs. Deux filles sont fortement tentées comme leurs mains l'indiquent. Mais le plus excité de tous est bien ce personnage aux deux mains tendus vers les filles qui est au premier plan dans une posture animale. C'est lui, malgré tout, qui donne le sens de ce tableau où, à première vue, le bras de la fille jouait le rôle le plus actif. Il est le personnage le plus avide qui révèle le mieux ce qui est en cause dans ce tableau étrange où les groupes semblaient séparés. La sexualité des garçons s'exerce en moteur, dans un schéma d'offrande. Les filles décident et le tableau montre le moment de la décision avec ce bras levé de la fille au croisement des diagonales.

La gestuelle très travaillée semble bien classique. Mais le classicisme artistique et sa maîtrise ne font que souligner par opposition les contraintes et la violence d'un instinct toujours prêt à se libérer.

 

dernière modification de cet article : 2018

 

 

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