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l'auteur
Une vidéo réalisée par les
élèves de l'AFPA pendant le congrès photo de Gracay :
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Photographie de rue
Justine et Sebastien, comment en êtes-vous venus à la photographie de rue ? Lors d’un voyage en camion en
2010-2011, du sud de la France au Mali, nous avons fait la
connaissance d’Issa Samado, un photographe de rue, vivant à Mopthi.
Fascinés par la beauté de cette technique, son ingéniosité, et sa capacité à remettre la rencontre entre le photographe et le sujet comme point fort du processus, nous avons décidé à notre retour en France de construire nos propres chambre-labo et de devenir à notre tour photographes de rue. Grâce à l'essai effectué avec la chambre du photographe malien, nous avons pu de mémoire en construire une première. En souvenir du photographe malien, nous l'avons appelée la chambre ISSA.
Nos chambres sont basées sur le modèle africain, reconnaissable à l'excroissance sur le côté qui sert à stocker le papier photo.
Plusieurs noms existent pour cette
technique : minuteros, Kamra-e-faoree, street box camera, chambre
gabonaise.
La chambre est composée d’un objectif, d’un dépoli sur système coulissant et d’une partie labo contenant le papier NB, un bac de révélateur et un bac de fixateur. La technique se divise en deux
parties. Depuis 2011, nous arpentons les rues de France, pour tirer le portrait d'anonymes croisés au hasard.
Les principaux avantages de cette chambre-labo sont de recréer un lien social temporaire entre les gens au détour des ruelles, de favoriser les échanges et de permettre à n'importe qui de repartir avec une photo « physiquement présente » en moins de dix minutes. Nous prenons beaucoup de plaisir à rencontrer toutes ces personnes et à discuter avec elles le temps d'une photographie. Expliquer la technique et la partager est un véritable plaisir pour nous. Ecouter les histoires des gens et les conseils et ressentis d'autres photographes en sont d'autres.
Le prix est libre, afin de permettre à tout le monde de pouvoir repartir avec une image sans se soucier des barrières liées à l'argent, cassant ainsi la logique liée à notre société de surconsommation, mettant un prix sur toute chose. La notion de « prix libre » est aussi à interpréter à la convenance de chacun. Chacun donne ce qu'il veut, ce qu'il peut. Il nous est arrivé plusieurs fois de faire du troc. Une photo contre une bouteille de vin, un cd de groupe de rue, etc.
Les fonds récoltés servent à financer nos projets photos personnels et à rembourser les frais liés au matériel, chimies et transport.
Toutes les chambres sont fabriquées avec des matériaux et des objets trouvés dans les encombrants, exceptées les optiques (offertes sur dons). Une planche d'échafaudage ou un vieux meuble serviront de bois pour la chambre, par exemple. Des objectifs cassés serviront d'œilletons. Une vieille chaise de bébé modifiée et restaurée servira de support à la chambre. Le but étant de réutiliser un maximum de matériaux, qui auraient dû finir à la déchetterie. Nous vivons la grande époque du gâchis et cela nous interpelle énormément...et à entendre les gens dans la rue, nous ne sommes pas les seuls.
Hors photographie, toute notre vie est basée sur la récupération et la transformation des objets. Au début, par nécessité, désormais par conviction. DIY(1). Cet appareil est un excellent outil pédagogique pour comprendre le fonctionnement d’un appareil photo et la création d’une image. Nous l'utilisons pendant nos interventions scolaires afin d'expliquer le processus photographique aux enfants, de manière simple et ludique (voir : L'atelier des petits photographes). Les optiques utilisées sont des optiques BOYER Saphir 1:4,5 135mm et Boyer Apo Saphir 1:10 240mm. La 135 pour le format 4x5. La 240mm pour le format 5x7. Début décembre 2013, nous repartons en Afrique de l'Ouest, en camion, pour trois mois. Du sud de la France au Burkina-Faso, en passant par le Maroc, la Mauritanie et le Mali, nous allons parcourir les rues d'Afrique de l'Ouest, avec une nouvelle chambre, que nous sommes actuellement en train de construire. Le matériel a été récupéré de nouveau dans la rue, et pour la première fois, nous avons acheté une optique dédiée à cette nouvelle chambre : une Schneider-Kreuznach Symmar-S 1 :5,6 180mm avec un obturateur Compur 1, trouvée à très bon prix sur ebay. Cette chambre sera utilisée sur un trépied cette fois-ci.
Les cadrages très frontaux des photos réalisées dans les rues nous frustrent de plus en plus. Ils sont avant tout liés à un problème technique simple : nous n'avons pas de trépied suffisant bon pour supporter le poids de nos chambres, d'où l'usage de tréteaux, et par conséquence, l'obtention de cadrages frontaux systématiques. Après ces expériences dans les rues, nous avons envie d'améliorer les cadrages et la qualité des images, mais surtout de choisir nos sujets. Ce projet en Afrique de l'Ouest est notre premier vrai projet photographique avec cette technique. Nous avons hâte d'y être et de le commencer.
Depuis trois ans, nous avons pour objectif de créer un camion labo mobile, qui soit dédié au nomadisme et à la photographie. Il nous servira de lieu de vie, de lieu d'échange de savoirs. Le but est de s'en servir pour réaliser nos ateliers photos pour les enfants, mais aussi comme un lieu de vie alternatif dédié à la photographie et aux photographes mobiles. Nous voulons en faire un lieu ouvert à double tour aux jeunes photographes, qui comme nous, désirent échanger, partager leurs savoirs, apprendre aux autres, apprendre des autres. Nous avions divisé ce projet en trois parties : récolter le matériel photo, commencer à donner des ateliers pour devenir crédible et acheter enfin le camion. La première partie a été largement réussie depuis trois ans, la deuxième partie nous a confortés dans l'idée de faire aboutir le projet, grâce notamment aux premiers ateliers que nous avons donnés, qui ont eu de très très bons retours auprès des enfants, des parents, des profs. Notre grande envie à l'avenir est la création de ce camion-labo. Nous souhaitons vivre dedans plusieurs fois par an, afin de donner nos ateliers photos aux enfants, rencontrer par son biais d'autres photographes et apprendre d'eux, parcourir les rues d'Europe en s'autofinançant par le travail et la vente à prix libres de photo dans les rues et ainsi réaliser nos projets photographiques plus personnels, principalement des reportages à caractère humain et social.
Nous tenons aussi à continuer le métier de minuteros, dans les rues, pour la simple et bonne raison, qu'il nous permet de financer d'autres projets photos, et que nous nous sentons à l'aise dans les rues au milieu de tous ces anonymes, curieux et bavards, qui partagent un peu de leur histoire, le temps d'une photographie. Tout semble bien parti pour le moment... A nous de nous bouger les fesses pour faire arriver ce projet à terme !
Nous tenons à remercier le site Afghan Box camera project pour son implication et l'hommage rendu à aux photographes de rues, à travers le monde.
Notes(1) DIY Do It Yourself : faites-le vous-mêmes. dernière modification de cet article : 2013
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